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Secret Sauces : Christian Jorge, pour le meilleur et pour toujours

No Bullshit
(5 mins)
Cette interview vous est présentée dans le cadre de “No Bullshit”, le média lancé par Captain Cause. Son ambition ? Être un shot d'inspiration pour mettre en avant les (bons) exemples des marques de demain ! Pour ce sixième épisode : zoom sur ces marques qui réussissent ce combo magique : consommer moins, engager plus.
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Pour cette édition, nous avons eu le plaisir d'échanger avec Christian Jorge, co-fondateur de Omie, première marque alimentaire qui valorise les produits issus de l'agriculture régénérative.

Un média vous a récemment qualifié de marque « RSE native ». Peux-tu me dire pourquoi et m’expliquer la mission de Omie ?

Tout le projet Omie est pensé autour de cette notion d'impact.
En créant l’entreprise, on s’est basé sur le framework du label BCorp. On a regardé chaque ligne, chaque catégorie… Et en creusant différentes pistes, on a finalement choisi d’aller vers l’alimentation parce que c’est un sujet qui réunit tous les enjeux du monde de demain : économiques, sociaux et écologiques. On s’est rendu d’ailleurs compte que le monde agricole représentait près d’un tiers du bilan carbone de l’humanité. Alors, comment réduire cet impact ? Comment produire mieux ? Comment préserver nos sols ? Avec Omie, notre volonté est de créer un nouveau levier pour promouvoir la mise en place d’une agriculture régénérative.

Comment développer le business sans tomber dans la surconsommation ?

La démarche de Omie est assez similaire à celle de Loom, dans un autre univers évidemment. Notre projet se situe tout en bas de la pyramide de maslow : se nourrir. C’est à la fois un besoin vital mais aussi et surtout un plaisir. Pour autant, on pense qu’il n’est pas nécessaire de proposer 80 recettes de sauces tomates comme on peut le voir dans certains rayons de supermarché. Nous revisitons les indispensables du quotidien pour qu’ils soient bons, sains et durables. Libre à chacun ensuite de les utiliser pour cuisiner et imaginer des milliers de recettes. Dans notre domaine, l’enjeu n’est pas tant de lutter contre la surconsommation mais de redonner le goût des bons produits, de la cuisine maison.

Est-ce que ce n’est pas limitant ou risqué d’un point de vue business de limiter sa gamme ?

Ce qui est compliqué, ce n’est pas tant que la gamme soit moins étendue mais plutôt que l’on s’attaque à un secteur très paupérisé. Les produits essentiels (coulis de tomate, penne, ratatouille, pesto, etc…) sont aussi ceux qui sont proposés avec les prix les plus bas. Or, dès que tu veux apporter de la valeur à ton produit, proposer de la qualité, les coûts sont plus importants. Ce n’est pas un problème en soit, mais c’est indissociable. En tant que marque, il faut l’assumer et surtout l'expliquer. Chez Omie, on a fait le choix de détailler précisément le coût de chaque produit. Les consommateurs peuvent non seulement voir qui gagne quoi mais aussi comprendre l’évolution des tarifs dans le temps. On peut se permettre cette démarche parce que l’on maîtrise l’ensemble de la chaîne. Je te mets au défi de savoir qui s’enrichit quand tu achètes un Twix. C’est impossible. Et d’un point de vue consommateur, ce n’est pas normal de ne pas pouvoir répondre à cette question.
Mix de produits Omie

Les marques doivent-elles être militantes ?

Certaines le font avec brio. Je pense à Patagonia ou à Veja par exemple. Quand tu achètes leurs produits, tu achètes aussi des valeurs et une démarche. Tu votes. C’est fou qu’il n’y ait pas d’équivalent aussi fort dans l’alimentation pour le moment. Acheter, c’est voter. Manger, c’est voter. Alors forcément, les marques ont un rôle à jouer.
Être militant, cela peut d’ailleurs se faire de plein de façons différentes. Chez Omie, on est plutôt partisans d’une approche progressiste. Comme le dit Jonathan Safran dans son livre L’avenir de la planète commence dans notre assiette : “l’inverse d’un omnivore n’est pas un végétarien, c’est un flexitarien”. Il n’est pas possible de changer une industrie de manière radicale dans un temps court. Il faut y aller par petits pas. Cela rejoint d’ailleurs l’approche BCorp qui consiste à tendre vers une progression continue. Chez Omie, ça nous amène à faire des choix (packaging, composition, etc…). Tout est question d’équilibre.

Récemment, vous avez noué des partenariats avec des acteurs clés du monde de la distribution avec par exemple un pop up à La Grande Epicerie. Est-ce obligatoire pour avancer ?

S’affranchir des modèles traditionnels c’est audacieux…. et dans notre côté c'est jouer contre la côte ! On a essayé !
Aujourd’hui, 90% des courses alimentaires en France sont faites à côté de chez toi. Pour toucher le plus grand nombre, il me semble essentiel de rester modeste et d’intégrer les réseaux classiques. Nous ne pouvons pas tout réinventer. Autant capitaliser sur la force des acteurs déjà présents. En revanche, pour émerger dans le paysage, il est essentiel de créer également une marque forte. Et ces partenariats sont aussi une façon d’y contribuer. Il apportent de la légitimité, de la crédibilité.
Omie et La Grande Épicerie de Paris

Dans l’univers de l’alimentaire, de plus en plus de marques proposent des formules d’abonnement (box repas clés en main, abonnement pour accéder à une épicerie, etc…). Quelle est la vision de Omie sur le sujet ?

À mon sens, le consommateur doit pouvoir acheter quand bon lui semble, auprès de la marque qui lui correspond. Au-delà de cet aspect plutôt idéologique, il y a un enjeu plus important. Souvent, cette formule d’abonnement est proposée avec la promesse de pouvoir bénéficier de prix plus bas. Or, cela contribue à cette fameuse guerre des prix dont on entend si souvent parler autour du monde de la distribution. Cette approche est destructrice. Baisse des revenus des agriculteurs, encouragement à des pratiques plus intensives, appauvrissement des sols… Un désastre sur tous les plans.
La seule solution est de proposer un prix juste. Un prix qui permet de rémunérer correctement tous les acteurs de la chaîne. Et je dis bien tous. Agriculteurs, transformateurs mais aussi logisticiens et distributeurs évidemment (pour n’en citer que quelques-uns).

Selon l’ADEME, en France, chaque année, par habitant, 30 kg de nourriture en moyenne sont gaspillés au domicile (auxquels s'ajoutent les pertes dans la restauration) ? En tant qu’épicerie en ligne, vous avez un rôle à jouer. Quelles actions mettez-vous en place ?

C’est un bon point. Quand on parle de gâchis alimentaire, il est important de souligner que le vrai sujet aujourd’hui, c’est chez le particulier. Une fois dans le placard. Ou dans le frigo. Effectivement, le gâchis industriel est plutôt bien géré aujourd’hui, notamment grâce à des entreprises comme Phénix, Too Good To Go, et bien d’autres. En revanche, pour le gâchis côté consommateur final, il y a encore un long chemin à parcourir. Le meilleur levier est la sensibilisation. Aujourd’hui, on jette des bananes quand elles sont marrons alors qu’elles sont encore parfaites pour être cuisinées dans plein de recettes. Chez Omie, on a choisi un autre combat majeur : encourager l’agriculture régénérative. Notre communication n’est pas axée autour du gâchis alimentaire. En revanche, on agit à notre échelle et restons vigilants sur le sujet. On a créé des rayons anti gaspi. On fait aussi des paniers To Good To Go.
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